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René Char _ Albert Camus

Publié le par fethiok









Lors de mon voyage  à Avignon;j'ai eu le plaisir d'assister à un récital vocal et musical intitulé:"Char,Camus ou les deux soleils de Sénac",de la compagnie Ciel du piano voyageur". Cette représentation m'a amené dès mon retour à Grenoble à me mettre  à la quête du livre:"Albert Camus – René Char, Correspondance 1946-1959". J'ai pu le trouver et j'ai entamé sa lecture,un pur bonheur.


Dès leur première rencontre, en 1946, ils se reconnurent.

Derrière eux, il y avait la guerre, la Résistance, et les engagements d'avant-guerre.

Ils appartenaient à la même espèce d'hommes.

De ce passé, des combats menés, et de ceux à mener encore naquit un respect mutuel sur lequel s'épanouit une profonde amitié.

La correspondance d'Albert Camus et René Char suit le lien précieux que l'écrivain et le poète développèrent au fil de leurs écrits respectifs, de leurs doutes, de leurs succès, de leurs préoccupations.

Tous deux se tiennent au courant de leurs travaux, s'envoient ou se font envoyer leurs manuscrits à peine achevés, se dédicacent leurs livres.

Il tient dans ces gestes non seulement une admiration réciproque, mais aussi et surtout le sentiment de maintenir le cap dans la même direction.

Si l'un comme l'autre demeure le plus souvent laconique sur les difficultés qu'il rencontre, pour ne pas « encombrer » l'autre, ni alourdir un quotidien qu'il sait déjà chargé, l'ami vient rappeler sa présence, demander des nouvelles, renouveler sans cesse son soutien. Leur commune délicatesse est exemplaire.

Malgré la pudeur, lorsqu'avec le temps les soucis deviennent trop pesants, et qu'avec le temps aussi la confiance et l'estime se renforcent encore, ils s'épanchent plus longuement.
Leur correspondance en devient extrêmement attachante. La figure de Char se dessine à travers ses lettres de façon progressive. Colosse qui sait si bien se défendre (comme on peut le voir à travers les aventures littéraires de l'époque) et qui a souvent l'air de « protéger » un Albert Camus en proie à la maladie aussi bien qu'aux attaques virulentes, notamment de Jean-Paul Sartre, René Char se met pourtant à exprimer furtivement sa souffrance.
Quant à Camus, malgré l'anxiété permanente, et souvent pire, il ne lâche rien de son amour de la vie, de son humanisme.

Enviable amitié :

« Un peu, où êtes-vous, cher Albert ?
J'ai la sensation cruelle, tout à coup, de vous avoir perdu. Le Temps se fait en forme de hache.
A quand ? »
(carte postale de René Char, le 14 septembre 1957).

Réponse de Camus :

« Plus je vieillis et plus je trouve qu'on ne peut vivre qu'avec les êtres qui vous libèrent, et qui vous aiment d'une affection aussi légère à porter que forte à éprouver. (...) C'est ainsi que je suis votre ami, j'aime votre bonheur, votre liberté, votre aventure en un mot, et je voudrais être pour vous le compagnon dont on est sûr, toujours. »
(17 septembre 1957).

Et Char d'ajouter :

« Ils sont en si petit nombre ceux que nous aimons réellement et sans réserve, qui nous manquent et à qui nous savons manquer parfois, mystérieusement, si bien que les deux sensations, celle en soi et celle qu'on perçoit chez l'autre emporte même élancement et même souci ... »
(septembre 1957).

Mais c'est aussi à l'amour de la lumière du sud que les deux hommes se sont reconnus. L'un né en Algérie ne se fera jamais à Paris, l'autre natif de l'Isle-sur-Sorgue n'aura de cesse d'y revenir. C'est là-bas dans le Vaucluse qu'ils partageront et assouviront leurs besoins de soleil et de grands espaces.

René Char y invitera systématiquement Albert Camus et cherchera pour lui une maison à acheter dans la région.

En peu de mots, la communion sur ce sujet semble totale.

« Ici il pleut, Paris a sa gueule d'acné. Je vous envie d'être au pays, le seul. »
(Camus, le 19 septembre 1950).

« Le contre-poison à l'arbre de bâtisse parisien, c'est l'arbre saisonnier de la forêt. »
(René Char, 20 octobre 1952).

Et encore :

« Le bel arc-en-ciel de vos livres fait ma joie. ensemble, ils miroitent entre le jour et la lampe, comme une truite de la Sorgue, entre gravier et cresson."
(René Char, 29 octobre 1953).

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L
Bonsoir Fethi,<br /> Hier je t'avais écrit un long commentaire pour te remercier de ce blog et te faire part de mon avis perso sur Albert Camus<br /> Impossible de publier le comentaire .....!!!...Ce soir j'ai la flemme je suis allé faire mes 4 km en piscine et je suis vané<br /> Alors je t"en dirai plus demain...Là je vais me coucher<br /> Je te souhaite une bonne nuit<br /> Amicalement,<br /> Henri
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V
Deux hommes hors du commun! j'aime beaucoup!<br /> Désolée de t'avoir "rajeuni" avec Bergson!<br /> Bonne journée<br /> Bisous<br /> Viviane
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O
une belle découverte ma foi, et quelle photo !
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A
merci pour cet article passionnant. J'ai adoré découvrir ces correspondances et en comprendre le sens entre ces deux hommes importants. Je ne connaissais pas ces échanges, je suis vraiment contente de les découvrir grace a toi<br /> Baisers<br /> <br /> Armandie
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M
Coucou Féthi, merci de nous faire partager cette belle rencontre.<br /> Bonne journée,
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:
Un bel hommage à une amitié sincère et profonde.<br /> Bon jeudi ! Bisoux.<br /> <br /> dom
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F
je ne connaissais pas ces écrits ; merci de nous les faire découvrir
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D
je viens de terminer cette correspondance et je suis tout à fait d'accord pour dire que ce livre est un régal<br /> je vais faire un article en fin de semaine sur mon blog<br /> et j'ai créé une communauté "autour de camus", n'hésitez pas à venir la rejoindre pour y mettre vos avis, textes sur Camus, ses lieux, ses amis...<br /> Denis
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J
Tu évoques avec bonheur ces deux grandes figures de notre littérature ! Tout ce qui touche à Camus est pour moi une source de plaisir et de souffrance car lui avait compris ce qu'il fallait faire en Algérie et personne n'a voulu admettre qu'il avait raison...
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C
Une belle histoire d'amitié entre 2 grands monsieurs<br /> <br /> bisous
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